Mais des crues historiques, des vents violents, l’arrivée des minoteries industrielles locales ou nationales tels que les Grands moulins de Paris dès 1921, conduisent à la disparition presque totale des moulins du territoire. Pourtant, certains meuniers (comme ceux du Moulin du Ginx à Arue, du Moulin Neuf à Callen ou du Moulin de Dubern à Salles encore en activité) anticipent le développement de cette concurrence et s’adaptent aux nouveaux besoins de production. Ils remplacent alors, ou complètent, leurs meules par des broyeurs mécaniques accompagnés d’ingénieux systèmes permettant de nettoyer, de calibrer le grain qui sera moulu, de l’acheminer d’un étage à un autre par des vis sans fin et des élévateurs à godets, ou encore de tamiser la mouture dans des plansichters (1) afin d’améliorer le rendement et les conditions de travail. D’autres moulins sont transformés à partir des années 1920 en usine de production d’électricité.
Aujourd’hui, sur les quelques moulins encore debout, peu sont visibles du public. Le moulin du Prieuré borde l’étang de la commune de Le Sen. L’extérieur du moulin de Lestrat à Lencouacq est accessible. Le moulin de Poussade (de la commune de Geloux) démonté et remonté au sein de l’Écomusée de Marquèze à l’emplacement du moulin de Bas fonctionne durant la saison estivale.
Le moulin de l'écomusée de Marquèze
Si la conservation des bâtiments et des équipements est aujourd’hui un enjeu crucial, celle des savoir-faire mérite également toute notre attention. Quelques propriétaires rassemblés au sein de l’Association de Sauvegarde des Moulins des Landes maîtrisent encore les techniques de réglage et d’entretien des moulins traditionnels. Rhabillage de la meule courante (travail constistant à raviver les stries de la meule tournant au-dessus de la meule gisante pour un meilleur broyage du grain) ou encore réglage de l’arbre (l’axe de rotation qui actionne la meule courante) sont des opérations indispensables au bon fonctionnement d’un moulin.
Entretien du moulin de Marquèze : pose de la meule courante par les membres de l'association de sauvegarde des moulins des Landes.
Le moulin du Prieuré, Le Sen
L’énergie indispensable à la survie des moulins doit effectivement être au rendez-vous. Il faut suffisamment d’eau ou de vent, mais faire revivre un moulin demande surtout le déploiement de forces humaines et de créativité. Les bénévoles de l’association Les ailes bénessoises reconstituant actuellement en totalité le mécanisme de dernier moulin à vent landais encore visible, situé à Bénesse-les-Dax, n’en manquent pas. Ce moulin, photographié en 1939 par l’ethnologue Pierre Toulgouat dont les photographies landaises sont conservées par l’Écomusée, connaîtra bientôt une nouvelle vie rythmée par la production de pains bios à partir d’une farine issue de céréales cultivées localement. « La rouetourne va tourner », comme le disait Franck Ribery il y a quelques années…
Florence Raguénès.
Conservateur de l'écomusée de Marquèze.
(1) Mot allemand désignant un appareil qui classe les produits de la mouture par un mouvement rotatif horizontal.